Anita Malagré, c'est la fascination des paradoxes.
Lumière et opacité, volonté et hasards, rugosité et espaces lisses. C'est une artiste qui joue avec le morcellement, le vide, la verticalité mais tout en ralliant pourtant une structure affirmée.
Peinture évoluant sur l'infinie variation de gris. Matité de l'acrylique contrastant la superposition et la transparence de fibres collées.
Depuis 1977 le travail d'Anita a beaucoup évolué. D'abord par une recherche à partir de lignes épurées naissant dans un monde géométrique… paradoxe des limites et de leur vide. C'est à partir de 1997 que le changement est total, utilisation de l'acrylique, encre, papier collé…, tout en gardant une structure certaine, mais dans une autre liberté, une autre approche de la matière.
« La base est depuis longtemps le gris, qui vire soit vers le bleu, soit vers l'ocre… Sans mélange ni contraste. Cette restriction constitue une contrainte créatrice et favorise la magie de ses affleurements satinés, filigranes et palimpsestes. Anita Malagré semble s'être vouée à la prolifération de la nuance. […] Strates minérales, géologiques et marines. Nervures de murailles schisteuses, comme celles de certaines forteresses. Paysage de grèves. Des gris ardoisés et orageux, ou bien virant aux tons de rouille, ombres de rouges et d'ocres, d'orangés ou de bruns. Certains gris sont clarifiés, parfois zébrés d'une touche éclair de lumière blanche. Il y a dans ces nuances des bleutés d'aube et de plages primordiales, de rougeoyantes nostalgies, et des étirements de crépuscules mal résignés à s'assombrir. Au cours de cette exploration patiente, méthodique et passionnée, de la richesse chromatique, Anita Malagré nous ouvre à des potentialités de différenciations à l'infini. Nous nous sentons à la fois lâchés dans l'espace et mystérieusement protégés. Profondeur de l'horizon, sans abîme ni effroi. Ce qui demeurerait d'une secrète angoisse latente se sait ultimement pacifié. »
Françoise Armengaud